La grosse bourgade de Bint Jbeil, qui fut le théâtre de terribles affrontements lors de l’offensive israélienne, n’est que dévastation. Les nouveaux plans de reconstruction prévoient une rue large de dix mètres, bordée de bâtiments à trois étages, avec des parkings souterrains. Mais quarante jours après la cessation des hostilités, Bint Jbeil continue d’aligner des monceaux de béton et de fers tordus. Malgré les pelleteuses et les camions qui travaillent à déblayer les décombres, à évacuer les gravats et à dégager les rues, on a l’impression que rien n’a été touché tant les dégâts sont immenses. Sur les 54 000 habitants que compte le bourg, 3 000 sont retournés chez eux, deux écoles sur sept pourront accueillir les élèves cet hiver et l’hôpital n’a pas cessé de fonctionner.
L’aide fournie par le PNUD aux autorités locales de Tyr a permis de déblayer les quartiers sinistrés, dégager les rues, combler les cratères, et collecter les tonnes d’ordures domestiques qui se sont entassées durant un mois. A Tyr même, le Conseil du Sud a répertorié 120 unités de logements détruites et plus de 500 autres sérieusement endommagées. De même, les pertes du secteur agricole sont énormes.
Plus au Sud, le village de Yarine, situé à un jet de pierre de la frontière avec Israël, a subi de grosses destructions et l’infrastructure a été démolie. Quelque 750 habitants des 2 450 qui ont fui les combats ont regagné leur domicile, mais ils manquent de tout : eau, vivres, tentes, couvertures. L’hiver approche et les gens n’ont nulle part où dormir. Ils n’ont pas de quoi acheter leur nourriture. Ils sont totalement démunis. Les deux épiciers du village n’ont, d’ailleurs, plus les moyens de garnir leurs étalages. A proximité du village, les bombes à fragmentation parsèment les champs, interdisant tout accès aux champs et aux oliveraies. Les récoltes de tabac et des olives sont perdues. Les munitions non explosées représentent un danger énorme pour les enfants obligés de vivre reclus à l’intérieur de la maison familiale en attendant la rentrée scolaire qui a été repoussée au 9 octobre.
La localité de Rmeich a été relativement épargnée mais souffre d’une pénurie d’eau, qui n’a cependant pas empêché les habitants d’accueillir, durant le conflit, plus de 15 000 déplacés de la région. La municipalité souhaite la mise en place d’un puits artésien et d’un système de collecte d’ordures.
Quelques kilomètres plus loin, Aïta el-Chaab, rasée à 95 %, offre une image apocalyptique. Le village, qui comptait 10 000 habitants, n’est plus que ruines, amas de béton et de fer qu’évacuent les pelleteuses et les camions. Des tentes ont été dressées pour abriter quelque 700 familles retournées chez elles. Et comme toute l’infrastructure a été dévastée, des citernes temporaires ont été mises en place pour résoudre le problème d’eau.
Dans tous les villages du Sud Liban, le bilan des 34 jours de guerre est dramatique, car partout, il y a un grave problème d’argent. Les gens ne travaillent pas, ils ont perdu leur récolte, leur bétail, leur petit métier. A l’approche de l’hiver, cette précarité risque de tourner à la crise humanitaire…
(D’après le reportage de May Makarem paru dans l’Orient le Jour du 24 septembre 2006)